Les Spadine
Avec la famille Spadine, nous continuons en réalité l’examen du réseau des affins Robellot. En effet, si aucune trace d’influence de la famille Pinart n’est visible dans les parentèles constituées par les alliances des Lespinay dans la deuxième moitié du XVe siècle et au XVIe siècle, par contre l’influence Lespinay-Robellot y transparaît nettement. On ne peut séparer les affins Robellot de ceux des sœurs et des enfants du trésorier. Mais c’est en étudiant la parentèle Spadine que l’on voit le mieux la mise en œuvre de relations sociales et familiales étroites entre bourgeoisie et noblesse du grand Ouest français (Bretagne, Normandie, Anjou, Poitou, avec un détour en Touraine) dont la construction a commencé au XVe siècle et qui se consolident en Bretagne nantaise au XVIe siècle et au cours des siècles suivants. En effet, les familles observées d’une part essaiment dans tout l’Ouest de la France et d’autre part s’allient à des familles non bretonnes venues faire fortune en Bretagne sous le règne des derniers ducs, puis à l’instigation d’Anne de Bretagne et des rois Charles VIII, Louis XII et François Ier. En outre, on va souvent retrouver des noms de familles rencontrés dans la parentèle Robellot et dans les relations professionnelles des Lespinay.
Une famille noble de Carquefou et de Nantes
Les Spadine
Jean II ═ Guillemette Jean de Lespinay du Guiniou Spadine │ (1423) │ │ Jean III ═ Brience Pierre de Lespinay Pinart Spadine (+1465) (+1500) │ ├────────────────┐ ├────────────────┐ Jean IV ═ Bertranne Renée ═ Jean Guillaume ═ Françoise de Lespinay Robellot de Lespinay Spadine Spadine Rouxeau (+1524) (+1500) (+1500) │ ┌───────┬──┴────┐ ┌────┴──┬────────┐ Jean Gilles Jeanne Jean (?) Thomas ( ?) Henriette Spadine Spadine Spadine Spadine Spadine Spadine ═ Isabeau (+1512) ═ Guillaume (née 1497) Picart ═ Gillette de Carheil Picart ┌─────────┬───┴────┬─────────┬───────┐ Gillette Françoise Gilles Raoullette Marguerite (née 1490) (née 1495) (né 1500) (née 1504) Spadine ═ François ═ Alain de ═ Yvonne ═ Charles ═ Robert (de) Ménardeau La Bouexière Percherel Blanchet Trégouët |
Jean Spadine le jeune, l’aîné des fils de Renée de Lespinay, époux d’Isabeau Picart, est parrain le 12 novembre 1492 à Ste-Croix de Nantes de Thomas fils de Jean Spadine seigneur de Beauvoys et de Marguerite [ ? ]. Il est mentionné dans le registre de St-Nicolas de Nantes (Arch. Mun. Nantes GG 168) au baptême le 6 août 1503 de Jean fils de Consuelo [Gonsalvo] de Complude et de Guydone [Guyonne] Le Goutz [Le Gouz], les parrains étant maître Raoul de Gamour, avocat à la Cour, et Jacques Huet, sieur de La Belière, et la marraine Isabelle [Picart] femme de Jean Spadine. Jean de Complude épousera Françoise d’Astoudelle et sera le père de Bonaventure de Complude (1532-1584), maire de Nantes. Il semble que la même Guyonne Le Gouz, fille de Raoul Le Gouz, ait épousé en premières noces Alonso de Mirande en 1496, dont elle a eu Jeanne née en 1499.
Gilles Spadine, deuxième fils de Renée de Lespinay, né vers 1470, a au moins cinq enfants de Gillette Picart sa femme qu’il épouse vers 1489. L’aînée, Gillette [alias Marguerite ? in Marquise de Lespinay, Jehan de Lespinay…, p.72] (née en 1490, baptisée à Sainte-Croix en présence de sa grand-mère Renée de Lespinay le 12 juillet), épouse ca.1506 François Ménardeau, fils d’Etienne et de Marguerite de La Rairie, d’une famille très liée aux familles de l’administration bretonne, bourgeoises et nobles, mais aussi aux Lespinay, aux du Chaffault et à leur parentèle, comme le révèlent en particulier les registres paroissiaux nantais (cf. plus loin). La deuxième, Françoise (née en 1495), épouse Alain de La Bouexière, procureur de la Chambre des comptes de Nantes, dont elle eut au moins deux enfants : Olivier et Anne. Le troisième, Gilles (né en 1500), époux d’Yvonne Percherel, fait partie en 1546 des héritiers de Jean Hux l’aîné (1499-1544), maître des comptes, son beau-frère, époux de Françoise Percherel. Sa sœur Raoullette (née en 1504) épouse Charles Blanchet, d’une famille que nous connaissons déjà. Enfin, Marguerite épouse Robert (de) Trégouët.
Les Spadine dans les registres paroissiaux
Voyons tout d’abord les baptêmes des Spadine et de leur descendance : ils ont tous lieu à la paroisse Sainte Croix de Nantes. Le 12 juillet 1490 est baptisée Gillette fille de Gilles Spadine et de Gillette Picart, en présence de sa grand mère Renée de Lespinay. Le 12 novembre 1492 est baptisé Thomas fils de Jean Spadine sieur de Beauvoys et de Marguerite [ ?], avec comme parrains Thomas Ernault et Jean Spadine [fils de Renée de Lespinay], et comme marraine « G. femme Jean Leclerc » [médecin de la duchesse]. En 1497 est baptisée Henriette fille de Guillaume Spadine seigneur de La Mainguaye et de Françoise Rouxeau.
La parenté Spadine – Ménardeau
Cette généalogie reconstituée à partir du registre des baptêmes de Ste-Croix de Nantes ne correspond pas du tout à la généalogie « sur titres » établie par La Chenaye-Desbois & Badier (1868, t.13, col. 615-624), où l’on fait exister la « famille noble & ancienne » des Ménardeau depuis 1272. Pierre Ménardeau, procureur général de la Chambre des comptes de Bretagne, époux de Renée Gabart, est dit fils de Pierre, maître des comptes, et de Hélène de Brécel fille de Louis sénéchal de Nantes, lui-même fils de François Ménardeau et de Renée-Françoise-Perrine Le Porcher [au lieu de Perrine Poher], qui est le fils de Jean-Baptiste-Ambroise Ménardeau, vivant en 1488, fils de Jean-Baptiste-César, etc. [2] En fait, il y a eu confusion entre plusieurs personnages. On ne retrouve pas trace d’un mariage Brécel (peut-être une Hélène Brécel, soit fille de Catherine du Chaffault et de Christophe Brécel, soit nièce de ce dernier, qu’un Pierre Ménardeau épouse en secondes noces vers 1550 ?). On y apprend néanmoins que François époux de Perrine Le Porcher [Poher] aurait eu deux autres frères : Noël, chef de la branche de Beaumont en Guyenne (qui existe en effet), et Jacques « seigneur du Housseau » (terre des Spadine), +1539, époux de Perrine d’Harouis, auteur de la branche de la Bouchetière (qui existe aussi), et dont le fils Pierre épouse Catherine Hus (elle est née en 1587 !), fille de Gabriel Hus trésorier des États de Bretagne. Or c’est Pierre Ménardeau, fils de Gillette Spadine qui est seigneur du Housseau, terre reçue de sa mère, et Pierre Ménardeau fils de Jeanne Hux qui est l’auteur de la branche de la Bouchetière. Il est possible qu’il y ait eu un Jacques Ménardeau et une alliance Harrouys, mais le Jacques mentionné ici est en fait François Ménardeau époux de Gillette Spadine. Les frères (probables) François et Étienne Ménardeau, fils d’Étienne et de Marguerite de la Rairie sont oubliés, alors qu’ils sont les ancêtres de tous les Ménardeau ultérieurs… Si les titres sont peut-être exacts, la filiation proposée ne l’est pas. Cela devrait obliger à vérifier avec soin, ce qui n’a pas été fait ici, la filiation des descendants d’Étienne Ménardeau et de Jeanne Giron.
Le 16 octobre 1527, Gilles fils de Maître Charles Blanchet, secrétaire à la chancellerie de Nantes, et de Raoullette Spadine (mariés ca. 1526) a pour parrains Me Guillaume de Carheil et G. Moraud sieur de La Perrière, et pour marraine sa grand-mère Gillette Picard dame de La Nicollière en St-Philbert [veuve de Gilles Spadine puis de Guillaume Jehan, lui-même veuf de Marie Aubin]. En 1528, sa sœur Anne a pour parrain Abel Rouault écuyer, sieur de Tréguel [époux de Jeanne de Lespinay, fille du trésorier], et pour marraines Anne fille de François Ménardeau et Françoise Rogon ; en 1529 son autre sœur Marguerite a pour parrain Olivier de La Bouexière, docteur es droits, procureur du roi en la Chambre des comptes de Bretagne, et pour marraines Marguerite et Françoise « les Ménardeaux ». Le 7 septembre 1525, Pierre fils de Guillaume de Carheil et de Jeanne Spadine (mariés en 1511) a pour parrains Maître Pierre Laurens, seigneur de Launay, procureur de Nantes, et René de La Serpaudaye (cousin de Guillaume de Carheil), la marraine étant Olive Le Roux (Arch. Mun. Nantes, GG414, 1513-1535). Pierre Laurens nous est connu, comme allié des Moulnier ou à propos des poursuites intentées contre Guillaume de Lespinay.
De 1534 à 1552, se suivent les baptêmes des 12 enfants connus de Gilles Spadine (né en 1500, fils de Gilles et de Gillette Picart) et d’Yvonne Percherel [ou Pescherel]. Parmi les parrains et marraines citons : 1534 Guillaume Laurens procureur de Nantes et Isabeau Picart ; 1535 Jean Hus [ou Hux] l’aîné, Jean Hus le jeune receveur de Nantes et Françoise Spadine femme d’Alain de La Bouexière, procureur de la Chambre des comptes ; 1536 Alain de La Bouexière et Françoise Percherel ; 1537 Jean de Carheil et Gillette Dessefort ; 1539 Pierre d’Acigné, chanoine de St-Pierre de Nantes, Jean Percherel et Marguerite Spadine femme de Robert Trégouët ; 1540 Jean de Langle, lieutenant de Nantes, Jeanne Mauléon épouse de Jacques de Châteautro sénéchal de Cornouaille et Jeanne de Trégaranteuc (fille de Pierre, petite-fille de Jean, commis de la recette de Ploermel de 1499 à 1520) ; 1541 François Gabart, Pierre Guischard (époux de Françoise Ménardeau) et Anne Ménardeau femme de Jacques Hubert ; 1543 Jean Laurens (époux de Jeanne Gabart, sœur de François), Pierre Ménardeau et Jeanne [Guéheneuc] de Juset femme de Jean de Langle sénéchal de Nantes ; 1544 Etienne Ménardeau, Françoise Ménardeau femme de Pierre Guischard et Anne Blanchet ; 1546 Françoise de Trégouët (fille de François et de Françoise Ménardeau) et Anne de La Bouestière [Bouexière] ; 1547 Audebert Touzelins receveur des fouages (commis de Pierre Touzelin, famille originaire de Tours), Vincent Jolivet, Jeanne Marqueraye femme de Jean Alain ; 1552 Gabriel [Guéheneuc] de Juzet procureur de Nantes, Guillaume Mortier et Jeanne Gabart femme de Jean Laurens. Parmi les baptêmes des enfants de Jean Spadine (né en 1535) et de Perrine Poher [ou Poyer, Pohet, Pohier], on note : en 1560 Gilles (parrains Gilles Spadine sieur de La Nycolière (son grand-père) et Alain Eubert [Hubert] « l’esné », sieur de La Thébaudière (fils de Jacques et d’Anne Ménardeau) ; marraine damoiselle Jeanne Poher dame de La Chevallerays) ; en 1561 Isabeau (parrain Jean Jallier sieur de La Renaudière, fils de François, receveur de Nantes, et de Marguerite Poullain ; marraines Isabeau de La Bouessière et Jeanne Spadine) ; en 1565 Yvonne (marraines Marguerite de Trégouët, fille de François de Trégouët sieur de Carmahéas, et Yvonne Percherel sa grand mère, femme de noble homme Gilles Spadine, sieur de La Nicollière ; parrain Claude Guyhéneuc sieur de La Selle, alloué des régalles de Nantes) ; en 1566 Marguerite (parrain noble homme [ ? ] Sorel [Soret], auditeur des comptes de Bretagne ; marraines damoiselle [Marguerite] Blanchet femme de noble homme Guillaume Le Maire, sénéchal de Nantes, et Françoise Spadine). Le registre de St-Clément de Nantes (Arch. Mun. Nantes GG13) complète celui de Ste-Croix avec le baptême le 20 août 1573 de Guillaume fils de noble gens Jean Spadine et damoiselle Perrine Pohel [Poher ou Poyer], sieur et dame de La Nicollière, avec comme parrains nobles gens Guillaume Lesnay, président au présidial d’Angers, second président du Parlement de Bretagne, et Guillaume Lemaire, sénéchal de Nantes, et comme marraine damoiselle Marguerite de Kermainguy femme de noble homme David Grimaud seigneur de Procé.
La descendance de Gilles II Spadine (à partir des registres), 1500-1600
Gilles ═ Yvonne Spadine Percherel °1500 ├─────────┬──────────┬──────────┐ Jean °1535 Guillaume °1534 Jeanne °1540 Gilles °1546 ═ Perrine Alain °1536 François °1541 Audebert °1547 Poyer Gilles °1537 Jean °1543 Gabriel °1552 (Poher) Pierre °1539 François °1544 ├─────────┬──────────┬───────────┐ Gilles °1560 Artus °1563 Yvonne °1565 Guillaume °1573 Isabeau °1561 Julien °1564 Marguerite °1566 ═ 1603 Françoise de Roussillon |
Parmi les autres baptêmes Ménardeau, on note comme parrains en 1553 Olivier de La Bouexière, seigneur dudit lieu ; en 1555 Guillaume Le Maire juge au Présidial de Nantes « époux de damoiselle Marguerite Blanchet » ; et comme marraines en 1555 Françoise de La Chasse [veuve de Jean de La Rivière (+1552), successeur de Guillaume de Lespinay à la Chambre des comptes] femme de noble homme Tristan de Saint-Martin, et Françoise Hubert. À noter aussi en 1556 le baptême de Pierre fils de François Ménardeau et de Perrine Poher [ou Poyer], sieur et dame de Ranzay, avec comme parrains Sire Pierre Poher ayeul et Pierre Ménardeau sieur de La Bouchelière frère du père, et comme marraine damoiselle Marguerite Spadine dame de La Maingays.
Quelques affins des Spadine
(A suivre…)
[2] La généalogie précise d’ailleurs que les premiers degrés ne sont pas prouvés et que la filiation est incertaine. Les prénoms multiples n’existant pas dans les registres des XVe et XVIe siècles, il est évident que ces premiers degrés sont faux. Quant aux trois « frères » François, Noël et Jacques, il s’agit d’un collage de trois individus de même époque (mais pas de même génération) dont on a fait des frères.