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5 mars 2008 3 05 /03 /mars /2008 19:34

Maïeutica est un logiciel développé par Jean-Philippe de Lespinay en 1990 sur fonds Anvar, destiné à l'origine à permettre aux non informaticiens de développer du système expert. Par la suite, il devint un outil généraliste de développement d'applications, sous le nom de T.Rex. Il est l'automatisation d'une méthode de son invention, qu'il a baptisée "Maïeutique" en 1986, en l'honneur de Socrate. En effet, Maïeutica est un logiciel qui interviewe les experts pour extraire leurs connaissances, alors que la Maïeutique décrite par Socrate était une méthode d'interview permettant de tirer de tout interlocuteur ses connaissances conscientes et inconscientes, et même de lui faire créer des connaissances nouvelles. Or, c'est exactement ce à quoi permettait d'aboutir la méthode "Maïeutique" de JP de Lespinay.

Genèse de l'idée

En 1986, l'inventeur de cet outil, alors Ingénieur Commercial en informatique, crée A.R.C.A.N.E., une startup avant l'heure, pour faire de la R&D en Intelligence Artificielle. Le sigle signifie "Automatisation du Raisonnement et de la Connaissance, Acquisition Normalisée de l'Expertise. En effet, en tant que commercial connaissant bien l'informatique et les entreprises, il était convaincu qu'il existait un marché pour des applications offrant des savoir-faire d'experts et que le problème de l'Intelligence Artificielle, c'était qu'elle ne savait pas comment recueillir facilement ces savoir faire. Mais, vu sa faible compétence en intelligence artificielle, son ambition est seulement de proposer des outils IA aux entreprises.

Fin 1985, il fait donc le tour des outils IA opérationnels disponibles sur le marché en France. Seuls des "générateurs de systèmes experts" répondent à son besoin. En effet, ceux-ci tournent pour la plupart sur les 1ers micro-ordinateurs, ce qui est économique. De plus, ils semblent se vendre déjà bien en entreprises, ce qui est une garantie d'opérationalité. Ces outils sont à l'époque : Guru, Nexpert, Intelligence Service, Personal Consultant +, Nexus, Genesia, VP Expert. Ils sont spécialisés "conversationnels", c'est à dire produisent des programmes capables de dialoguer avec leurs utilisateurs. Utilisant des moteurs "IA", ils sont également censés être utilisables par des développeurs non informaticiens. Intuitivement car personne n'a à l'époque publié de comparatif sur ces outils, il choisit Intelligence Service qui lui paraît le plus abouti et le plus convivial. Puis il se met à le présenter en clientèle. Cet outil est commercialisé par la SSII GSI TECSI, qui en a elle-même acheté le prototype - Pandora - à l'Université Paris VI. Pandora a été développé par deux thésards sous la direction de Jean-Louis Laurière.

Pour le compte d'un colloque IA, la Convention IA 1989, il fera par la suite (1988) le test de ces outils en compagnie d'un chercheur universitaire spécialisé en IA. Tous les deux découvriront qu'un seul générateur de systèmes experts est réellement à la portée du développeur non informaticien : Intelligence Service. D'abord, il effectue un vrai raisonnement. Ensuite, les règles s'écrivent immédiatement et en langage courant. Enfin, le logiciel fournit les explications sur le raisonnement et détecte les contradictions. Toutes ces innovations étaient déjà dans Pandora, sans apparemment que personne n'en parle. Aucun de ses concurrents n'offre ces caractéristiques qui sont propres à l'IA. Ils demandent l'intervention répétée d'informaticiens spécialistes pour le développement et ne génèrent finalement qu'une application conversationnelle qui aurait pu être écrite classiquement et plus facilement avec un langage procédural.

Pendant les 6 premiers mois de 1986, il parcourt les entreprises pour leur proposer d'acheter Intelligence Service. Mais elles n'achètent pas. L'image de l'IA est déjà à cette époque en baisse, elles veulent la preuve que ce logiciel développe bien du système expert. Il est donc obligé de commencer à écrire des règles devant le client et de les faire tourner. Puis il interviewe des experts d'entreprises pour mettre leurs connaissances dans le système expert. Le problème, c'est que les experts sont incapables de décrire des règles utilisables. A force de les interviewer et de discuter avec eux, il élabore une méthode qui semble marcher très bien avec Intelligence Service. L'expert doit imaginer qu'il est au téléphone avec ses interlocuteurs habituels, ceux qui ont tant besoin de ses lumières, et imaginer quelle 1ère question il leur poserait pour traiter leur problème. Cette 1ère question est très facile à trouver pour eux. Ensuite, la voie est toute tracée : cette question attend quelques réponses bien déterminées, chaque réponse va déclencher une question, qui aura des réponses, jusqu'à la déduction finale qui résout le problème. Tracées sur papier, cela donne une arborescence contenant des expressions en clair. Par analogie avec la démarche Socratique, qui consiste à extraire des connaissances par un dialogue logique, il appellera cette méthode : "la Maïeutique" et le développeur qui l'utilise "maïeuticien". Le maïeuticien, dans son esprit, est l'exact opposé du "cogniticien" proposé par la société française Cognitech. Le maïeuticien est un cadre de l'entreprise sans connaissance informatique spéciale, le cogniticien est un informaticien formé aux techniques de l'IA et aux générateurs de systèmes experts qu'il utilise.

La Maïeutique

Cette méthode, utilisée des centaines de fois pendant l'année 1986 en démonstration d'Intelligence Service, fait rapidement la preuve de son efficacité. Les experts rentrent naturellement dans le processus d'interview partant d'une question pertinente de départ et la dizaine de règles recueillies sur leur expertise fonctionnent à leur satisfaction. Reste à savoir si elle sera valable pour traiter une expertise réelle, beaucoup plus volumineuse, à la satisfaction d'utilisateurs utilisant quotidiennement le système expert.

Les reproches faits aux systèmes experts

A l'époque d'Intelligence Service(1986), les systèmes experts sont mal acceptés des utilisateurs des entreprises, pour les raisons essentielles qu'ils les trouvent non conformes à leurs attentes et incapables d'évoluer, ce qui les rend rapidement obsolètes. Un autre reproche leur est fait : leur dialogue ne sait pas s'adapter au niveau d'expertise de l'utilisateur et traite un expert de la même façon qu'un néophyte. C'est à dire qu'ils posent à l'expert de nombreuses questions inutiles (prévues pour les néophytes) pour en arriver à déduire ce qu'il sait dès le début. Du coup, les experts ne les utilisent plus et ne peuvent se rendre compte des endroits où ils manquent de pertinence pour demander des modifications. Tous ces défauts sont propres au développement procédural : développement très lent, non itératif (sans contrôle des experts et des utilisateurs), résultat "imposé" brutalement aux utilisateurs, dialogues figés dans le temps alors que l'expertise utilisée évolue constamment, impossibilité de gérer l'"explosion combinatoire" que réclament des dialogues devant être différents suivant l'expertise des utilisateurs. Ces reproches sont le signe que ces grosses applications ne disposaient pas davantage que les autres d'une intelligence artificielle.

Joséphine 

Joséphine est un système expert de conseil en placement financier réalisé pour la Banque de Bretagne en fin 1986 par Arcane, société fondée par Jean-Philippe de Lespinay.

  • Moteur d'inférence : Intelligence Service
  • Temps de développement : 3 mois (oct-nov-déc 1986)
  • 980 règles
  • 5 000 lignes de Pascal pour les procédures externes de calcul et d'édition
  • Fonctionne sous MS DOS
  • Occupe 1,5 Mo sur disque dur.
  • méthode de développement : Maïeutique
  • Développeur : un cadre de banque non informaticien
  • Expertise : fournie par deux experts analystes de la banque
  • Son nom, "Joséphine", est un jeu de mots humoristique inventé par les experts, qui signifie : "Gestion Optimisée par Système Expert FINancier" .

Le "placement financier" c'est le placement de l'argent d'un particulier en fonction de son goût du risque, de son patrimoine, de sa fiscalité, de sa situation familiale et de ses besoins de dépenses prévisibles. A la Banque de Bretagne, il y a près d'une centaine de produits financiers, chacun spécialisé dans un domaine plus ou moins grands et l'idéal serait de les combiner pour arriver au placement idéal.

 

 

Liens 

  1. T.Rex, en version commerciale sur le site Tree Logic
  2. Vidéo démontrant Tiara sur le site Youboss
  3. Téléchargement de Tiara Explorateur sur le site 01Net
  4. Un agent intelligent sur la page d'accueil de Tree Logic (cliquer dans la bulle)
  5. Démonstrations de conversationnels développés avec T.Rex

Articles, conférences et publications

  • "Développer un système expert" de Michel Le Seac'h, 1989, chez édiTests
  • "Du zéro pointé au Zéro Plus" de Jean-Philippe de Lespinay, Science et Vie mai 1991
  • Exposé "les 7 avantages des systèmes-experts" (Jean-Philippe de Lespinay) et exposé "le système expert Banque de Bretagne de conseil en placement financier" par Jean-Louis Préteseille de la Banque de Bretagne, aux "Journées Internationales de l'Intelligence Artificielle 1987", Palais des Congrès Porte Maillot à Paris, le 17 juin 1987
  • "La Maïeutique : une méthode de réalisation de systèmes experts opérationnels" au CESTA (Centre d'Etudes des Systèmes et Technologies Avancées, rue Descartes à Paris), 19 novembre 1987
  • Exposés "Intelligence Artificielle et systèmes experts : principes et avantages" et "La Maïeutique : une démarche IA tournée vers les PMI" au Colloque "Les systèmes experts et les IAA, Réalités et Perspectives" organisé par l'APRIA (association pour la,promotion industrie agriculture)
  • "Un système expert de conseil en placement à la Banque de Bretagne" par Jean-Luc Préteseille à la 7ème Semaine Française de Marketing Direct au Palais des Congrès à Paris
  • Exposé sur l'IA au colloque CIGREF-AIA des 14-15/12/1988
  • Exposé au 3ème colloque européen Fiabex (11-13 décembre 1990)
  • Les Echos du 11 juillet 1986, page 2 : "L'intelligence artificielle chez soi"
  • 40 articles sur le système expert Joséphine (Banque de Bretagne) : Ouest France, Les Echos, Le Figaro, LePoint, Le Nouvel Economiste, La Croix, Le Grand Livre du Marketing, Banque et Informatique, Bancatique, Bretagne Economique, la revue du CXP, 01 Informatique, Technologies Bancaires, Ordinateurs, Le Monde Informatique, Ressources/Temps Réel, Défis, Science et Technologie, LLIA, FTS, L'Obs Economie, Courrier Cadres, Decision Informatique, Science et Vie Micro, Le Nouvel Observateur, Maintenance, Industries et Techniques, French Technology Survey, MOCI, Univers Cité, Newbiz (avril 2002), Centres-Appels.com, etc.
  • En 1990, après expertise, le Crédit d'Impôt Recherche en logiciel est accordé à JP de Lespinay par le Ministère de l'Industrie et de la Recherche pour sa R&D.
  • En 1990, le Ministère de l'Industrie et de la Recherche accorde à Jean-Philippe de Lespinay, diplômé d'école supérieure de commerce, le titre de "technicien de recherche".
  • En 1990, une aide est accordée par l'Anvar à Jean-Philippe de Lespinay pour le développement d'un prototype de Maïeutica
  • En 2000, l'Anvar accorde le label FCPI ("Fonds Commun de Placement Innovation") à la R&D de Jean-Philippe de Lespinay pour faciliter sa recherche d'investisseurs.
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