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17 février 2009 2 17 /02 /février /2009 15:27

Le réseau de parenté étendue des Lespinay, XVe-XVIe s. (5)


Les Pinart


Les Pinart du XVe siècle, issus de la région de Guingamp et Morlaix, nous sont mal connus. Leur filiation reste incertaine même si l’on peut en tenter une reconstruction. Certains ont été mariés plusieurs fois, et/ou très tardivement, ce qui peut expliquer des écarts importants entre deux générations (cas d’Yvon II Pinart, né ca.1395, dont les fils Paul et Alain se marient au début des années 1470 ; cas de Roland, né ca.1400, qui épouse selon certains généalogistes sa seconde femme Marguerite Quintin vers 1460, et dont le fils cadet Yves se marie en 1506). Mais il est possible que derrière un prénom se cachent deux personnes, comme par exemple pour Roland, époux de Valence Gicquel, qui pourrait ne pas être le Roland Pinart qui épouse Marguerite Quintin, celui-ci étant plutôt le fils cadet d’Yvon II et le fondateur de la branche de la Noë-Verte. C’est aussi à cause de ces écarts entre générations que certaines généalogies actuelles (dont la base Roglo sur l’internet) ont fait de Roland un fils d’Yvon II.

Nous proposons une construction généalogique qui tient compte des archives (voir les travaux de Jean Kerhervé, 1986, et de Dominique Le Page, 1995), des dates connues et des généalogies anciennes. Roland Pinart paraît être de la même génération qu’Yvon II. Par ailleurs, Yvon II est l’auteur de la branche aînée des Pinart du Val et des rameaux de La Noë-Verte et de Cramailles, alors que Roland est l’auteur de la branche de Cadoalan (cf. entre autres Augustin du Paz, Histoire généalogique de plusieurs maisons illustres de Bretagne, Paris, Buon, 1619). Paul Pinart et ses frères Alain et Roland, fils d’Yvon II, sont ignorés des généalogistes actuels alors qu’ils ont eu une descendance conséquente. Il reste donc encore du travail de reconstruction à faire pour mettre en relation généalogique tous les Pinart du XVe siècle et situer plus sûrement Brience Pinart.

Nous savons que les hommes de cette famille furent presque tous officiers de finance au XVe siècle. Brience Pinart faisait-elle partie de la famille Pinart du Val ? C’est ce qu’affirment les généalogistes du XVIIe siècle, mais nous n’en avons aucune preuve puisque aucun document d’époque n’en fait la mention. C’est pourquoi, contrairement aux Robellot, nous ne pouvons rien affirmer sur un éventuel « réseau Lespinay-Pinart ». Nous en sommes réduit à des hypothèses qui, au vu du réseau familial Pinart, penchent en faveur de l’appartenance de Brience Pinart à la famille Pinart de Morlaix, particulièrement à sa branche du Val, dont la souche est Yvon II Pinart.


Rappel des alliances Pinart connues

(généalogie reconstituée, qui reste une hypothèse)

 


Pierre Rouzaut        Yvon I Pinart, Sr du Val = Catherine Ollivier, dame de La Fouais

        │                       (+ ca.1416)                            (+1417)

        │                           ├─────────────┐

Ysabeau Rouzaut = Yvon II Pinart        Roland Pinart = Valence Gicquel

                              (1417, 1427)            (1419, +1462)       (+27.02.1458)

                                     ├────────┬─ ─ ─┐

        Catherine    =  Paul Pinart   Alain Pinart     Brience = ca.1440 Jean III

     de Kerloaguen     Sr du Val     et Roland     (née ca. 1420)    de Lespinay

                                    

                             Yvon Pinart = Michèle Gibon

                                          (1500)

 

L'importance des Pinart se déduit du jugement des commissaires de la montre de 1481 ( le comte de Coëtmen, Roland de Rostrenen et Olivier Le Moënne), pour le rôle de Morlaix, qui estimaient les Pinart comme étant la famille la plus riche de Morlaix, possédant 240 livres de rentes en terres nobles. Or Paul Pinart, fils d'Yvon II, présenta pour lui à cette montre son frère cadet Roland Pinart comme archer en brigandine escorté d'un second archer. Les commissaires exigèrent que le sieur du Val servît désormais par hommes d'armes, c'est-à-dire par un cavalier en armure complète accompagné de deux ou trois combattants (in Louis Le Guennec, Choses et gens de Bretagne, Quimper, 1976).

Quelques alliances Pinart au XVe siècle sont connues, avec les familles : Ollivier, Rouzaut, Gicquel, Quintin, Kerloaguen, Gibon dont plusieurs membres ont été officiers de finance (fermes et offices) ou à la Chambre des comptes de Bretagne. En étudiant ces familles, on découvre d’autres liens avec des hommes de l’administration ducale, comme les Callac, les Carné.

L’alliance Kerloaguen paraît importante. Cependant, il n’y a pas de certitude sur la filiation de Catherine de Kerloaguen, épouse (ca.1460 ?) de Paul Pinart, fils aîné d’Yvon II, et peut-être belle-sœur de Brience Pinart et Jean III de Lespinay. Il semble qu’elle soit la fille de Maurice de Kerloaguen, président à la Chambre des comptes de Bretagne, qui sera en 1446 commissaire pour la Réformation de la noblesse. Ce Maurice de Kerloaguen, époux de Louise Bréhel (ou Bréhet), est lui-même fils d'un autre Maurice, président aux comptes de Bretagne, qui épouse en 1400 Marguerite Estienne. Cette parenté, certaine, avec un président de la chambre des comptes ouvre aux « affins » des possibilités supplémentaires de contacts à haut niveau dans les milieux administratifs et financiers du duché. Quant à Alain Pinart, 2e ou 3e fils d’Yvon II, il épouse en 1473 Marguerite Quintin, fille de Richard Quintin (+1502), sieur de Coatamour et miseur de Morlaix, et de Jeanne Coëtanlem, alors que Roland Pinart son frère épouse vers 1460 une autre Marguerite Quintin, fille de Guillaume Quintin, aussi sieur de Coatamour, et de Marguerite de Kermerc’hou. Cette deuxième Marguerite Quintin pourrait être la sœur de Richard, Guillaume Quintin étant leur père à tous deux. Les Quintin ne semblent pas faire partie de la noblesse au XVe siècle, Richard Quintin ayant été anobli avec ses enfants en 1491.

Une autre alliance importante socialement est, en 1500, celle d’Yvon Pinart (fils de Paul et de Catherine de Kerloaguen) avec Michèle Gibon, fille de Jean II Gibon et de Jeanne de Fresnay. Ce Jean Gibon, fils d’un secrétaire du conseil du duc de Bretagne (Amaury Gibon, +1478), petit-fils d’un président de la Chambre des comptes de Bretagne (Jean I Gibon, +1453), est auditeur en 1477 puis procureur à la Chambre des comptes jusqu’en 1504. Ses descendants seront alliés aux Carné et, par eux, aux Callac (un chambellan du duc Jean V, un chambellan du roi Louis XI), autre famille de la Chambre des comptes de Bretagne. Avant d’être une famille de « financiers » au sens large, les Gibon sont une famille de vieille noblesse bretonne, alliée à de grandes familles (Beaufort, Coëtquen, Coësmes, Cornouaille, Dresnay, Eder, etc.). Jean IV de Lespinay a-t-il pu bénéficier de l’appui des Gibon, alliés de son éventuel cousin germain Yvon Pinart ? Il semble que non, la date de l’alliance (en 1500) étant tardive.



Les Gibon au XVe siècle 

Noël Gibon   =   Marguerite Eder

       │     (ca.1390)

       │

Jean Gibon    =   Olive de Cléguennec

  (+1453)       (1422)

       │

Amaury Gibon = Amice Rolland                              Maurice de Kerloaguen

  (+1478)                                                                                        = Louise Bréhel

       │                                                                                │

Jean II Gibon = Jeanne de Fresnay                                 Catherine    =  Paul

       │                                                                       de Kerloaguen    Pinart

       ├────────────────────────┬────────────────┐             │

Jean III =1) Henriette de Kermerien    Jeanne = Guillaume    Michèle  =  Yvon

Gibon      2) Jeanne de Lannion            Gibon    de Bahuno     Gibon       Pinart

                                                                                                 (1500)

              

Les alliances antérieures d’Yvon Pinart, sieur du Val, avec Isabeau Rouzaut et de son frère (supposé) Roland avec Valence Gicquel, renforcent les liens des Pinart avec le milieu des offices financiers. Les Gicquel étaient une famille de financiers au service des Penthièvre au XIVe siècle (Kerhervé, 1986) ; Valence Gicquel serait la fille de Thomas Gicquel et d’Isabeau de Tréléver, qu’il a épousé à Morlaix le 13 juin 1399. Si Brience Pinart, épouse de Jean III de Lespinay, est bien la fille d’Yvon et d’Isabeau Rouzaut, elle est alors la petite-fille de Pierre Rouzaut, sieur de La Trinité, lieutenant et receveur de Guingamp, et de Jeanne de Kernec’hriou (alias Kermerc’hou, alias Crechamion, +1421), tante probable de Marguerite Quintin, seconde femme de Roland Pinart. Dans ce cas, Jean III de Lespinay, par son mariage, a des liens directs avec des hommes de finance de la région de Guingamp et de Morlaix, son beau-père Pinart ayant lui-même bénéficié de l’appui de son beau-père Rouzaut. Ainsi, le Jean de Lespinay qui est receveur des fouages de l’évêché de Léon en 1446 (Arch. L-Atl. B 4296 f° 227 r°) est peut-être Jean III, qui aurait alors bénéficié de l’appui de sa belle-famille. Cependant, nous ne trouvons aucune autre trace d’un appui des Pinart dans leur région au profit d’un Lespinay, alors que l’on a vu que la collaboration à Plessé entre les Parageau et les Lespinay, sans parenté directe, est étroite.

On le voit ici comme dans les études précédentes : on a l’impression qu’un certain nombre d’alliances matrimoniales s’effectuent au sein d’un même milieu administratif et financier, mais qu’elles paraissent être plus des conséquences que des causes de l’ascension des familles étudiées. Celles-ci ont créé entre elles des liens professionnels, accrus progressivement par divers liens matrimoniaux. Bien que l’histoire de ces familles nous soit peu connue et que d’autres alliances intéressantes aient pu nous échapper, les carrières administratives et financières dues à des appuis précis et directs, autres que ceux des pères (Yvon I et II Pinart) et des beaux-pères (Pierre Rouzaut, Thomas Gicquel, peut-être aussi Yvon II Pinart à l’égard de Jean III de Lespinay), nous semblent peu répandues.

Autre piste, l’historien Jean Kerhervé (Les gens de finances des ducs de Bretagne. Catalogue prosopographique (1365-1491), 1986, p.386) émet indirectement l’hypothèse que les liens entre les Lespinay et les Pinart sont nés de Françoise d’Amboise, duchesse de Bretagne, qui avait reçu en douaire Guingamp (Pinart) et Le Gâvre (Lespinay), dont elle prit possession au décès de son mari en 1457. En effet, outre Guingamp, les liens de la duchesse avec Plessé et Le Gâvre sont connus (voir Marquise de Lespinay, Jehan de Lespinay…, 1937, en particulier p.47-58). Cette hypothèse, plausible, pourrait faire de Brience Pinart, mère de Jean IV de Lespinay, une demoiselle d’honneur de la duchesse ; passant à plusieurs reprises à Rozet avec la duchesse, elle y aurait fait la connaissance de son futur mari. Mais ces informations ne montrent pas si et comment les carrières de Jean III et de Jean IV ont pu être influencées par la duchesse avant qu’elle se retire au couvent ou par les Pinart et leurs alliés.

 

 


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