Pierre de Lespinay, petit-fils du trésorier
et les débuts du protestantisme
Sources : Marquise de Lespinay, Pierre de Lespinay et les débuts du calvinisme à Blain, Chantonnay, Impr. A.Gaultier, [1939], 90p.
Roger Joxe, Les protestants du Comté de Nantes au seizième siècle et au début du dix-septième siècle (Préface Henri Lavagne), Marseille, Ed. Jeanne Lafitte, 1982, 328p.
Les premiers Lespinay protestants sont d’abord membres de la communauté de Blain, sous la tutelle des Rohan. Très vite, du fait des persécutions (celles de Mercœur en 1585) et de leurs possessions en Pays de Retz et en Poitou, ils vont s’installer dans la communauté de Vieillevigne, plus sûre.
Il est possible que la conversion de Pierre de Lespinay, avant d’avoir récupéré le patrimoine familial de Plessé, entre les mains de Louis du Perreau, ne soit pas due uniquement à l’évolution de ses idées personnelles. L’influence de la cour des Rohan, de leurs alliés Coligny et la rancœur à l’égard du pouvoir y furent probablement pour quelque chose. Cependant, les liens avec la cour royale n’ont jamais été mauvais, Guillaume de Lespinay, puis son père et ses petits-enfants ayant bénéficié de la protection royale à plusieurs reprises, recevant même du roi une autorisation spéciale de chasse ou une demande en vue du mariage d’un protégé du roi avec une protégée de Pierre de Lespinay.
Informations tirées de R. Joxe
Blain. « Aux alentours de Blain et de Plessé, une foule de gentilshommes de plus ou moins vieille chevalerie formaient aux Rohan comme une cour et une garde. Les listes seraient longues des manoirs, des Huguenotières plus ou moins fortifiées qui, tapies à tous les replis des vallons, faisaient le cercle autour de leur forteresse : Henleix, Pontpiétin, la Massais en Blain, Malaguet, Le Chêne vert, l’Allier, l’Epinay, Buhel, Calestré, Trémar en Plessé, ou encore, un peu plus à l’écart, Tréguel et Pingué en Guéméné, Vauguérin en Vay, Villoin entre Bouvron et Fay, ou encore, la Cour de Bouée. Là se logeaient de hardis capitaines, héros des guerres passées ou à venir, Pellisson de la Ferassière à Vauguérin, Bourceau de Chesneverd à Plessé, ou de nobles maisons aux alliances enchevêtrées, tels les seigneurs du Chaffaut ou de l’Epinay, ces Chaffaut, dont le manoir se dressait à l’ouest de Plessé et qui tenaient aussi la petite place de Buhel, et leur alliés, les Perreau de Catillon, qui, comme eux, s’entêtèrent jusqu’à la Révocation. C’est même parce qu’en juillet 1563, un dimanche, au grand temple de Blain, « à l’endroit de l’exhortation publique », Pierre de l’Epinay épousa, à la huguenote, Léonore, fille de Louis du Perreau, chevalier, sieur de Catillon, que Le Noir de Crevain, ayant tenu en main l’original du certificat notarié, y pourra voir l’indiscutable preuve de l’ancienne possession où fut l’Eglise de Blain cent un ans avant la démolition du temple en 1665.[268] »
[Note 268 : Crevain, p.124, 126. L’acte était signé Françoise de Rohan, Charles Quellenec du Pont et Guyonne de Théhillac. En 1559, Léonore du Perreau avait été marraine avec Marguerite d’Epinay]
p.97, note 284 :
[le Chaffault est le nom porté par Pierre de Lespinay, donné aussi à ses terres dans certains documents, et non un lieu-dit de Blain ; Bougarré est au Sud-Est de Plessé ; le Guény est un lieu-dit de la paroisse de Plessé ; Buhel, Lallier, Roset appartiennent à Pierre de Lespinay après son mariage en 1563 ; Trémar appartient à Henri, seigneur de Castillon en Fay-de-Bretagne]
p.105.
Sion. « Parmi ces patrons de l’Eglise de Sion, mi-rennais, mi-nantais, tous plus ou moins cousins, le premier rang, après le tout-puissant seigneur de la Roche-Giffart, revenait sans conteste aux Le Maistre de la Garelay. Ils étaient parents de la Noue, le futur Bras-de-Fer, qui venait de leur céder divers petits fiefs entre Don et Vilaine. Leur château de Derval, en vue de la Chère, place forte à double enceinte, aux larges douves, avait jadis été donnée à Robert Knolles par le duc Jean IV, ce qui lui valut l’honneur d’être assiégé par le connétable Duguesclin. Ils furent aussi seigneurs de l’Orme, en Sion, de la Haye en Pierric, de la Garlay en Derval. »
[Cette famille n’est pas étrangère aux Lespinay. Jean V de Lespinay, fils du trésorier, avait épousé en premières noces Hélène de Marbré, fille de Jeanne Le Maistre. Pierre de Lespinay était donc cousin du célèbre Guillaume le Maistre, chef huguenot, capitaine de Blain puis de Vitré. Louise Le Maistre, fille de Guillaume, épouse en 1627 un cousin des Lespinay par les du Chaffault, Gabriel de Goulaine, dont la fille Henriette épousera Jacob II de Lespinay, arrière-petit-fils de Pierre de Lespinay. Les nouveaux convertis sont souvent parents et établissent entre eux de nouvelles alliances]
p.110.
Vieillevigne : « Au premier rang les La Lande de Machecoul, seigneurs de Vieillevigne, et les Laudonnière de Goulaine se firent les chefs du mouvement sur la frontière de Bretagne. »
p.111.
Les Laudonnière : « Ils résidaient au manoir de Laudonnière, au nord de Vieillevigne, et c’est là que Jean VI de Goulaine fut le premier Protestant. Il avait, en 1554, épousé Barbe de Machecoul, fille de Jean de La Lande et de Françoise Chasteigner : tout naturellement il suivit [p.112] l’exemple de son beau-frère et devint l’un des piliers de son Eglise[342]. »
[Note 342 : (…) Fils de Jean V et d’une du Chaffault, Jean VI, veuf sans enfants, épousa en 1564 Françoise de Gastinaire de la Preuille (en St-Hilaire de Loulay) : il en eut quatre filles et cinq fils, tous Huguenots] [Jean VI de Goulaine était le cousin germain de Pierre de Lespinay]
p.116.
[Note 360 : Crevain, p.242 : en 1595 [1585], Abigaÿ de l’Epinay se marie à Briord et Samuel de l’Epinay y épouse une fille de la maison de Briord. Crevain s’étonne que ces mariages soient célébrés par le ministre Guineau et non par celui de Nantes.] [Abigaÿ est Abigaïl, fille de Pierre de Lespinay et Aliénor du Perreau, qui épouse le 19 février 1585 Jean de Breil alors que son frère aîné Samuel épouse le même jour Suzanne des Roussières, héritière de Briord]
p.191.
La Rochelle : Lieu de refuge des huguenots persécutés, en particulier de l’Eglise de Blain, qui doivent fuir avec les Rohan les assauts de Mercoeur en 1585-1586. « D’autres Bretons, accourus derrière le vicomte René de Rohan ou Louveau, s’y retrouvaient, comme après 1572, assez nombreux pour y former une notable partie de la population huguenote et même avoir leur temple particulier à Sainte-Marguerite, avec Louveau, Thierry de Vieillevigne, Oyseau de Trévecar, et qui dura jusqu’en 1598[153]. »
[Note 153 : Tels MM. de Kergrois, du Ponthus, de l’Orme, du Chaffault, de la Babinaye, de la Chevrolière. (…) « Pour apprendre l’histoire des Réformés de Bretagne, dit Crevain, il faut les aller chercher à la Rochelle. » [M. du Chaffault est Pierre de Lespinay, obligé de porter le nom du Chaffault par le contrat de mariage entre son père Guillaume et Marie du Chaffault, aînée et héritière du nom.]
p.261.
Eglise de Blain, dans les années qui suivirent l’Edit de Nantes en 1598, dont les supports sont bourgeois et nobles « aux alliances entrelacées ». « Nobles enfin, vieux capitaines, hobereaux campagnards, officiers de petite judicature, parmi lesquels les Rohan recrutaient leurs fonctionnaires et qui se partageaient les charges administratives ou judiciaires de la seigneurie : mais la génération militaire des Guerres de Religion achevait lentement de s’éteindre. Les nouvelles générations, plus occupées de leurs blés, de leurs bois et de leurs moutons, portaient d’autres rêves en tête. Les huguenotières qui faisaient le cercle autour de Blain et de Plessé, avec leurs douves, leurs tourelles anachroniques, n’avaient plus à jouer que le rôle paisible de maisons des champs : La Cour Mortier, visible aujourd’hui encore au bourg même de Blain ; Henleix, La Massais, Le Pordo, Pontpiétin, Le Chesneverd autour de la petite ville ; Malaguet, l’Epinay, Buhel, Trémar, Calestré, l’Allier, Pingué autour de Plessé (…). La liste complète en serait longue, longue aussi celle des gentilshommes qui y résidaient. Il faut citer d’abord les de l’Espinay du Chaffaut, réformés de la première heure, logés à Buhel, petite place entre Plessé et Roset[82] (…). »
[Note 82 : Arch. dép. Loire-Atlantique, G 542, Plessé : Poursuite de l’évêque Philippe de Cospeau contre Isaac de l’Espinay, qui s’est permis d’enterrer sa femme Esther du Plessis en la chapelle Saint-Jean. Arch. dép. du Maine-et-Loire, I.1 : en 1628 à Sorges (Eglise d’Angers) Isaac de l’Epinay, fils de feu Pierre de l’Epinay et dame du Chaffaut [ ?], épouse Anne de la Vaizouzière. Bastide, op. cit. Granges de Surgères cite des l’Epinay de la Limouzinière et de Villiers.] [C’est la mère de Pierre de Lespinay qui est dame du Chaffaut et non sa deuxième femme, mère d’Isaac.]
Informations tirées de Mise de Lespinay
Après 1555, Pierre de Lespinay quitte sa maison du Plessis de Mareil en St-Viau (pays de Retz) et s’installe à Mallarit, près de Plessé, se rapprochant ainsi des Rohan et du foyer protestant en gestation à Blain.
p.16.
p.18.
p.20.
p.24.
Selon la marquise de Lespinay, Pierre de Lespinay aurait été attiré vers le calvinisme par l’influence de Louis du Perreau, demeurant au château de Blain, plus que par celle des Rohan et d’Andelot. Louis du Perreau aurait rapporté ses idées d’Angleterre…
[Dès 1535, les idées de la Réforme circulaient en Europe. Louis du Perreau avait épousé en 1542 Jacqueline de Rymerswael, fervente catholique, mais dont la dernière sœur, Isabelle, était huguenote : elle avait épousé Jacques de Bourgogne (+1557), veuf de Yolande de Bréderode, huguenot notoire « dès l’âge de quinze ans », ami de Calvin qui entretint avec lui une correspondance de 1543 à 1553, publiée en 1744 sous le titre Lettres de Calvin à Jaque de Bourgogne Seigneur de Falais & de Bredam & à son épouse Jolande de Bréderode, Amsterdam, chez K. Westein, 1744, in-8. Voir aussi : Jean Calvin, Excuse de noble seigneur Jaques de Bourgoigne, seigneur de Fallez et Bredam : pour se purger vers la M. Impériale, des calomnies à luy imposées, en matiere de sa foy, dont il rend confession, première édition de Genève, 1548, 49p. ; et Jean Calvin, Apologie pour Monsieur de Falais, présentée à l’Empereur Charles Quint (s.d., s.l., imp. en latin). En 1551, selon Calvin, Jacques de Bourgogne et sa femme se seraient détournés du calvinisme « authentique », parce qu’en désaccord avec Calvin, mais on sait qu’ils restèrent protestants jusqu’à leur mort. Si Jacqueline de Rymerswael n’était pas huguenote, une partie de son entourage familial l’était, mais il semble bien que son premier mari, Louis du Perreau, soit mort trop tôt (en 1548) pour que l’on sache s’il serait devenu finalement calviniste]
p.32.
« Lenoir, historien protestant et pasteur de l’Eglise réformée de Blain, nous dit qu’il [Pierre de Lespinay] était l’un des membres les plus zélés de cette Eglise. »
p.37.
Pierre de Lespinay épousa en juillet 1563 Eléonore du Perreau au grand temple du bourg de Blain, un dimanche.
p.40.
Pierre de Lespinay a été arrêté en 1570 pour profession de foi calviniste, et relaxé par arrêt du parlement de Bretagne. Ses biens avaient été saisis parce que l’on prétendait qu’il avait porté les armes contre le Roy. Le 14 mai 1570, ses biens sont saisis à nouveau.
p.43.
Pierre restait en bon terme avec le roi Henri IV. Celui-ci lui adressa de Saint-Maixent (à « Monsieur du Chauffault »), le 20 mars 1582, une lettre lui recommandant la demande en mariage d’une nièce de sa première femme, Anne Héaume de La Rousselière, qui a été élevée chez lui, par le capitaine de La Roche « enseigne de la compaignie de mes vieilles gardes ». Un post-scriptum, de la main du roi, termine la lettre : « Je vous envoye ce gentilhomme pour vous pryer d’afectyonner ce maryage et me mander ce que vous y aurez faict. » Signé : « Votre bien bon et afectyonné amy, Henry ».
p.47.
Le 9 juillet 1573, Pierre obtient de René de Tournemine une sauvegarde pour sa personne, sa famille et ses serviteurs pour pouvoir circuler entre leurs divers biens (Chaffault, Monceaux, Lemozinière, Lespinay, Malarit) et dépendances.
p.48.
Le 14 juillet 1580, l’entrée de Nantes lui est interdite ainsi qu’à ses serviteurs, étant de la religion réformée (ALA, EE 202 f°14).
p.49.
Fin juin 1586, le catéchisme général, qui se faisait quatre fois l’an, a lieu chez « Monsieur du Chaffault ».
p.50.
« Monsieur du Chaffault » participe au catéchisme général de La Rochelle en juin 1587, en la maison de Mr de Cargrois, avec les pasteurs de La Porte, Louveau et Thierry, et d’autres Bretons de l’Eglise réformée de Blain.
p.56.